A trois jours du début des primaires de 2008...
La campagne dure depuis un an. Depuis les premiers jours de janvier 2007, les candidats parcourent les Etats-Unis et enchainent les passages médias afin de recueillir les précieuses voix des électeurs pour les primaires. Jeudi 3 janvier 2008, le coup d'envoi pour les votes de cette longue course sera donné avec les primaires de l'Iowa. Suivront ensuite le Wyoming, le New Hampshire, le Michigan, pour au final cinquante suffrages locaux.
Les candidats encore en lice ayant une chance de gagner les primaires sont nombreux. A quatre jours des primaires, parlons des chances de succès des candidats Républicains.
Rudy Giuliani reste le front runner de cette primaire. Cependant, au cours de ces derniers mois, il s'est beaucoup fragilisé. Partant de presque 40% d'intentions de vote, il survit aujourd'hui autour de 20%. Et s'il reste de fait le favori, dans le détail, cette position semble plus difficile à assurer.
Le danger des primaires à l'Américaine depuis tout temps consiste dans le déroulement progressif des suffrages. Or, les premiers Etats à voter sont souvent décisifs, les électeurs voyant dès lors qui a une candidature solide, et qui n'a pas les moyens d'emporter les premiers suffrages. Nombre de candidats se sont effondrés pour ne pas avoir assez pris en compte ce système.
Cela sera t-il le cas de Rudy Giuliani ? En réalité, ses chances de succès restent réelles. Quasiment inexistant dans les sondages de l'Iowa et du New Hampshire, il reste cependant fort dans quelques premiers Etats, dont le Wyoming (5 janvier) et la Floride (29 janvier). Sa stratégie d'espérer survivre à ce premier mois de suffrages, pour ensuite remporter le reste des Etats est cependant tout à fait crédible au vu de la lutte que se font ses principaux concurrents. En Iowa, au New Hampshire, en Caroline du Sud et au Michigan, les sondages montrent que ses adversaires directs sont au coude à coude la plupart du temps, ou se concentrent chacun dans un Etat "bastion". Son avantage est qu'une telle situation ne permettra à aucun d'entre eux de sortir du lot. Dans ce cas, il lui sera tout à fait possible de prétendre remporter les Etats votant le 5 février, puis l'ensemble des Etats suivants. Le danger de sa situation est que sa victoire ou sa défaite dépend des résultats de ses concurrents, et non de ses propres capacités à gagner des suffrages.
Mike Huckabee est la surprise de cette fin d'année 2007. Depuis des mois, il fut toujours considéré comme le vainqueur des différents débats, et son expérience de gouverneur de l'Arkansas couplé à un grand talent oratoire lui ont permis d'être le dernier à sortir la tête au dessus des autres. Aujourd'hui autour de 17 % des intentions de vote, son leadership dans certains des premiers Etats font de lui un candidat solide selon de nombreux observateurs.
En effet au coude à coude avec Mitt Romney en Iowa et en Caroline du sud, il lutte aussi face à Rudy Giuliani en Floride. Son pari est clair. Remporter l'Iowa pour s'imposer comme nouveau leader de la course. En réalité, il s'agit même là de toute sa stratégie de campagne : remporter l'Iowa. S'il y parvient, il pourra sérieusement espérer vaincre Romney en Caroline du Sud, et alors s'imposer comme un candidat de premier plan. Cependant, cette stratégie de "bastion" développée par Mike Huckabee est risquée. S'il ne remporte pas l'Iowa, ou s'il ne l'emporte qu'avec peu de marge sur le second, il ne pourra pas s'imposer. Dans ce cas, il risque d'entrer entièrement dans le jeu de Rudy Giuliani, et ne pas pouvoir lui prendre sa place. En bref, si Huckabee n'emporte pas l'Iowa avec une bonne marge sur ses concurrents, ses chances de gagner la nomination du Parti Républicain vont vite diminuer.
Mitt Romney fait aujourd'hui partie des leaders de cette campagne, tout en étant dans une situation très particulière. Alors qu'il semble à la traine dans les sondages nationaux avec "seulement" 15% d'intentions de vote (derrière Rudy Giuliani, Mike Huckabee et John McCain), il sembler mener la course dans de nombreux Etats. Plus important que tout, il est le seul candidat Républicain à pouvoir prétendre à la victoire dans tous les Etats votant en janvier 2008.
En gros, les premiers Etats se divisent aujourd'hui, selon les sondages, en trois groupes. Ceux prêts à voter pour Giuliani (Wyoming et Floride), ceux prêts à voter pour Huckabee (Caroline du Sud), et ceux prêts à voter pour Romney (Nevada, Michigan, New Hampshire). Dans ces trois groupes, s'il n'est pas le leader, Mitt Romney est au minimum au coude à coude avec le candidat avantagé par les sondages. Il s'agit de sa stratégie de longue date. Conquérir les premiers Etats afin de s'imposer comme seul crédible.
Ses meilleures chances aujourd'hui sont donc de pouvoir gagner le plus rapidement possible le plus d'Etats possibles. L'Iowa est son premier objectif. Le dernier sondage le donne victorieux avec neuf points d'avance sur Huckabee dans cet Etat (sondage de l'American Research Group du 29 décembre). Si une telle victoire lui était assurée, il lui serait désormais facile de remporter tour à tour le New Hampshire (actuellement treize points d'avance), le Michigan, la Caroline du Sud, la Floride et le Nevada. Ceci fait, Mitt Romney se sera imposé comme leader de la primaire Républicaine.
Cependant, le danger existe toujours. S'il ne parvenait pas à gagner en Iowa, il y a fort à parier que John McCain pourrait emporter le New Hampshire, ou y faire un bon résultat (comme semblent l'indiquer les sondages). Or, une non victoire dans ces deux Etats scellerait le sort de Mitt Romney, en le laissant comme un candidat certes crédible, mais qui ne deviendra jamais suffisement solide pour l'emporter dans le reste des Etats Unis face à Rudy Giuliani.
A propos du leadership de Mitt Romney, voir l'article de Ronald Browstein du 28 décembre.
John McCain est dans une situation quelques peu étrange. Troisième dans les sondages nationaux, il est pourtant le seul des quatre premiers à ne mener dans aucun Etat. Cette situation est très difficile, car cela lui limite grandement ses chances de succès. Cependant, il lui est toujours possible de remporter cette primaire.
S'il reste faible dans l'Iowa, il se trouve être fort au New Hampshire. Son statut de presque centriste l'aide bien plus dans ce second Etat que dans le premier. Un peu à la manière de Rudy Giuliani, si la compétition Romney/Huckabee finissait sur une égalité ou presque, l'absence de front runner après les premiers suffrages empècheraient l'apparition d'un leader. Dès lors, il lui serait possible d'espérer menacer sérieusement Romney au New Hampshire, et d'ainsi se lancer dans la course réellement. Ou tout simplement, en cas de victoire d'Huckabee en Iowa, il serait probable que Mitt Romney descende par la suite dans les sondages. Cela pourrait laisser un boulevard à McCain pour une victoire au New Hampshire.
Cela laisserait un duo de leaders, avec un duel très serré entre McCain et Huckabee. Cependant, il s'agit aujourd'hui de la meilleure chance de McCain de gagner ces primaires.
A propos de la campagne de John McCain
En conclusion, il est difficile aujourd'hui de prédire un gagnant. Cependant, les probabilités de victoires augmentent en fonction des candidats. Au vu de leurs situations, Rudy Giuliani et Mitt Romney commencent ces primaires avec plus de sérénité. Rudy Giuliani n'est pas réellement concerné par l'Iowa quand Mitt Romney est aujourd'hui en mesure de survivre à une défaite dans cet Etat. Huckabee et McCain eux sont en grande difficulté. Si le premier ne gagne pas le 3 janvier, il risque de disparaitre de la course. Quand à McCain, sont sors dépend entièrement des résultats des autres candidats, position on ne peut plus inconfortable.
Après avoir longtemps pensé que Mitt Romney n'avait au final aucune réelle chance, il s'avère aujourd'hui, à quelques jours des premiers votes, qu'il soit celui à la position la plus solide. En fait, s'il gagne en Iowa, il est peut probable que McCain et Huckabee aient encore quelques chances de l'emporter. Cependant, imaginons une victoire de Mitt Romney. Même dans ce cas, il n'est pas dit que cela lui suffise à ébranler Rudy Giuliani. Si ce dernier reste stable sur ses bases et ne chute pas dans les sondages pour cause de défaite dans les premiers votes, il est plus que probable que l'ancien maire de New York reste le leader et ne finisse par gagner cette primaire.
Pierre Toullec
Retrouvez sur notre site officiel tous les détails concernant les derniers sondages et la page des résultats des premiers votes des primaires (premiers résultats le 4 janvier au matin).